S’il est un diamant dont la beauté n’a d’égale que sa trépidante histoire, il s’agit bien du Hope !
Diamant d’un bleu aussi intense que l’encre qu’il a fait couler… Il concentre tout ce qu’on peut attendre de rêves et de fascination de ces précieuses gemmes…

Tout commence au XVIIème siècle avec Jean-Baptiste Tavernier, célèbre voyageur et négociant en pierres précieuses pour le compte de la couronne française et de la noblesse européenne, qui traça de nouvelles routes de commerce.
De son sixième et dernier voyage en Inde, parmi le millier de diamants qu’il rapporte, s’en trouve un, bleu, de 115,16 carats. Outre le fait qu’il vienne de Golconde, région mère des plus beaux diamants du monde, on ne sait pas précisément comment Mr Tavernier se l’est procuré. Des Indes il apprit aussi l’art d’entretenir le mystère autour de ce que l’on convoite…

En 1669, c’est Louis XVI, friand de diamants, qui en devient le propriétaire. La pierre, baptisée « Grand Bleu de France », est alors encore taillée de façon minimaliste, du goût des rois mogols. Elle ne révéla tout son potentiel qu’en 1671, et c’est Jean Pittan, lapidaire de génie du roi, qui innova en lui donnant une belle forme de triangle arrondi de 69 carats. Entièrement facettée, la pierre révèle en son cœur un motif de soleil, clin d’œil à son propriétaire, et renvoie la lumière de manière inédite et exceptionnelle.

Intégrée à l’ensemble des joyaux de la couronne, inaliénables depuis François Ier, elle sera montée pour Louis XV sur l’insigne de la « Toison d’Or » lors de sa nomination comme chevalier à cet ordre aristocratique prestigieux.

Après lui, Louis XVI ne portera que très peu ce diamant, soucieux de ne pas faire l’étalage de trop de richesses dans un pays alors en crise, mais sa bonhomie et ses bonnes intentions ne suffiront pas à empêcher la révolution et son arrestation. Après sa tentative d’évasion au début de l’été 1791, la fameuse « fuite de Varennes », la confiance entre le roi et le peuple est rompue : tout ce qui pouvait lui rester de biens précieux est transféré avec le reste des trésors de la royauté au garde meuble, l’actuel musée de la marine situé place de la Concorde à Paris.

Un minutieux inventaire de son contenu est alors réalisé, et tous les premiers mardis des mois d’été, chacun pouvait venir visiter librement le trésor. Or tant de richesses réunies en un seul et même endroit trop peu gardé ne pouvaient présager que d’une seule issue…

Ainsi, en 1792, entre le 11 et le 16 septembre, c’est toute une bande de voleurs menée par Paul Miette qui dérobera joyeusement chaque nuit une belle partie du garde meuble, et le diamant bleu avec !
Si la plupart des joyaux sont rapidement retrouvés après enquête, c’est ici que l’on perd officiellement la trace du Grand Bleu de France…

Coup de théâtre, en Angleterre, très exactement vingt ans et deux jours après le vol du garde meuble, apparait un grand diamant ovale de 45,5 carats, d’un bleu similaire au Bleu de France, et c’est Henry Hope qui l’acquerra en 1824, lui donnant son nom.

Note intéressante, le délai de prescription pour un vol est à l’époque de vingt années …

A partir de là, la pierre aura de nombreux propriétaires, et ironie de l’histoire pour un diamant dont le nom signifie « espoir », beaucoup connaitront drames et revers de fortune.

C’est finalement en 1958, que le joaillier Harry Winston décide d’en faire don, par simple envoi postal, au Smithonian Institute of Washington, comme pour en rompre le sort : le Hope deviendra alors une aubaine financière pour l’établissement, attirant de nombreux visiteurs.

A ce jour, le Hope demeure la pièce phare du musée, et si depuis plus d’un siècle, beaucoup l’ont soupçonné d’être le Grand Bleu de France retaillé, aucune preuve ne permettait de l’affirmer … jusqu’en 2007 !

Cette année là, dans la réserve du Muséum d’Histoire Naturelle de Paris, le professeur de minéralogie François Farges découvre le seul modèle en plomb du Grand Bleu de France : sa réplique exacte, fidèle en tous points à ce dernier, dans une boîte étiquetée de plusieurs informations, dont la mention « Mr Hope de Londres ».

Fort de cet indice supplémentaire, le professeur a pu comparer toutes les mesures disponibles (scan en 3D du Hope, plomb du Bleu de France, notes des inventaires…) : verdict, elles s’ajustent parfaitement, et la légère asymétrie du Hope s’explique même alors par la contrainte qu’était de retailler un ovale dans un triangle.

Le Hope est en définitive bien le Grand Bleu de France, et ce qu’il a perdu de carats, il l’a gagné en Histoire… jusqu’à sa prochaine aventure !